En Chine du Sud, les provinces du Yunnan, du Guangxi et du Guangdong sont depuis toujours entachées d’une mauvaise réputation sanitaire. À la fin du XIXe siècle, l’arrivée de médecins occidentaux, pasteuriens convaincus, va modifier notre connaissance de la santé en Chine. Ces praticiens, munis de microscopes et capables d’utiliser dans leur diagnostic une sémiologie nouvelle, identifient quelques pathologies et de grandes épidémies. Mais en essayant de traiter ou d’hospitaliser la population locale, ils modifient également les pratiques de santé. Au contact de ces médecins, qui restent dépourvus d’autorité officielle à l’égard de la population chinoise, le gouvernement des Qing met sur pied une police sanitaire, première autorité publique moderne à se voir confiée la santé de la nation chinoise. Là où les médecins occidentaux s’activent à soigner et à former la population, des notables et des riches marchands chinois établissent des structures charitables concurrentes qui diffusent notions et techniques occidentales de santé. Parallèlement, pour lutter contre l’influence étrangère, les médecins traditionnels s’efforcent d’unifier leurs savoirs et de s’organiser dans le cadre d’une véritable profession. Sous la triple impulsion des médecins occidentaux, de l’Etat et des élites locales, les pratiques individuelles de santé évoluent. Vers la fin des années 1920, et dans les villes ouvertes à l’étranger, si la médecine traditionnelle, la religion et la magie persistent, le recours à la médecine occidentale s’est élargi à toutes les classes de la population pour des pathologies de plus en plus variées. Grâce à l’exploitation systématique des archives sanitaires coloniales françaises, combinée à celle des « chroniques locales » chinoises rédigées aux XIXe et XXe siècles, l’auteur montre comment la multiplicité des références et des pratiques médicales a favorisé l’adoption de modèles thérapeutiques étrangers.
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