Écrire l’histoire d’un crû classé du Bordelais, n’est-ce pas se contenter de voler au secours d’une victoire déjà assurée ? Sans doute. Mais quand cette histoire est exemplaire des continuités et des transformations séculaires du vignoble des Gravas de Bordeu, cet « espace matriciel de la viticulture bordelaise » pour reprendre les mots de Sandrine Lavaud, pourquoi la dédaignerait-on ? D’autant que les monographies sur les grands domaines de Graves ne sont pas légion. Des tenanciers médiévaux de l’abbaye Sainte-Croix de Bordeaux dans cette paroisse Notre-Dame de Martillac, jusqu’à la renaissance des vingt dernières années sous la direction de Florence et Daniel Cathiard, le livre retrace l’évolution du bourdieu de Maujan, devenu maison de campagne des Douzon de Bourran à l’Époque moderne, puis propriété du sage et truculent personnage que fut Dufour Dubergier, maire de Bordeaux, « Roi d’Aquitaine », inventeur du classement de 1855 et véritable créateur du vignoble actuel. Exemplaire des continuités et des transformations séculaires du vignoble de Graves, avons-nous dit, cette histoire ne saurait se passer de son contexte. Privilège des vins de Bordeaux, hiver terrible de 1709, oïdium, occasion ratée du classement de 1855, phylloxéra, etc. Heurs et malheurs des Graves de Bordeaux, qui n’ont rien à envier dans leurs plus belles réussites à la gloire médocaine. Smith Haut Lafitte en est une démonstration.
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